mercredi 28 mars 2012

Le Policier

Réalisé par Navid Lapid – Avec Yiftach Klein, Yaara Pelzig, Menashe Noy, Shaul Mizrahi, Michael Aloni, Gal Hoyberger, Meital Barda, Rona-Lee Shim’on – Israël – 1h50

Une route vide dans le désert, des cyclistes apparaissent, sprintant dans les montées, sous la chaleur écrasante. Démonstration de force incongrue et un peu ridicule…
Ces membres de la Police israélienne s’arrêtent, regardent un paysage caillouteux en proclamant qu’il est « le plus beau du monde » et hurlent leurs noms dans le silence de l’immensité désertique.

L’ouverture du film de Navid Lapid annonce la couleur : la force dérisoire, la certitude de sa puissance le tout dans une économie de mots et de moyens, « Le policier » entend ainsi remettre en question la supposée fascination des israéliens pour ses forces de l’ordre.
Le cinéaste va ainsi répéter son message au fil de séquences brillamment mises en scène mais qui deviennent caricaturales et répétitives.
Les interminables tapes viriles que les policier se donnent en guise de salut, un barbecue où les hommes jouent à s’affronter physiquement, tandis que les femmes, souvent enceintes, les couvent du regard : On est d’abord séduit par ce regard sur un monde viril caricatural, où la place de l’homme et de la femme est prédéfinie.
Le problème de Navide Lapid est qu’il ne dépasse jamais le cliché.
Les flics sont nécessairement des salauds racistes, leur amitié n’est qu’apparence.
La deuxième partie du film répond à ces lieux communs par d’autres lieux communs : un petit groupe d’extrême gauche composé essentiellement de jeunes petits bourgeois prépare l’assassinat de riches potentats locaux.
Une fois de plus on est d’abord amusé, puis lassé. Le discours très « indignés de la république » est aussi caricatural, réjouissant au début, puis vite agaçant au fur et à mesure que le regard sur la société israélienne se fait convenu et paresseux.

Le propos est asséné sans subtilité : les flics comme les jeunes ne pensent qu’en terme de clichés ; l’ennemi est forcément arabe pour les uns, forcément bourgeois pour les autres : la confrontation entre ces deux mondes autistes finira dans le sang et l’absurdité.

Cela aurait pu nous toucher si derrière les stéréotypes Navid Lapid avait cherché des êtres humains. Mais il regarde Israël avec les mêmes œillères que ses personnages. Sans jamais chercher lui non plus à aller au-delà de la surface des choses.

La réalisation est précise, les séquences efficaces, mais ses personnages n’existent jamais vraiment. En fait de portrait corrosif d’une société qui ne vivrait que dans le cliché, on a le droit à une démonstration, esthétiquement réussie mais intellectuellement limitée.
Loué évidemment par la critique française « Le policier » dégage surtout le parfum d’une provocation de festival.

Jeremy Sibony

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire